Lous Portis - Place St Pierre. Marché aux grains, grande construction de style renaissance italienne démolis en 1888. En ce moment, magasin de nouveautés Charbonnier. Au premier étage, il y avait le Café de l'Avenir chez Chiteri, tous les dimanches, lous bergamasés (les habitants de Bergamo en Piémont, peut-être une façon de dire, les piémontais) venaient y manger et danser au son de l'accordéon, ils gambillaient dur jusqu'à une heure avancée de la nuit. Voyez le gendarme Desmaisons pour tapage nocturne.
Desmaisons - Gendarme, la terreur des braconniers de la Vallée, pour faire du service, il en éprouvait le besoin. Les mauvaises langues disaient qu'il avait collé un procès-verbal à sa femme. Il était amplement connu, même au Mexique.
Misoni. Le garde-champêtre
Nous patinions dans le pré de la Damisela, derrière l'église. Un cri… voici Misoni, nous partions comme une volée de moineaux, comme il manquait une planche à la balustrado nous sortions derrière le Café de Paris. Comme il était déjà un peu vieux et qu'il glissait nous n'avions pas peur qu'il nous attrape.
L'Amoulet (le remouleur)
Il venait tous les printemps des Granges, petites maisons qui sont entre le col de Larche et l'Argentière. Il annonçait son arrivée à Barcelonnette en passant dans les rues et criant « Repassez ciseaux cotos et rasoirs ». Les petits ramoneurs passaient aussi en criant « Eh, ramonez la cheminée du haut…en bas»… je ne parle pas de ceux qui achetaient peou dé lèbré pèou de lapin, aquéou que nin a pas qu'espeillé son chin. (Peau de lièvre, peau de lapin, celui qui n'en a pas qu'il écorche son chien -Cri de guerre du pateaire, le ramasseur de peaux et de chiffons.)
Les petits vieux
Chaque matin, ils se rassemblaient deux ou trois, et faisaient la tournée des grands ducs. En ces temps là, les épiceries avaient sur le comptoir une grande terrine en grès avec des petits verres autour, pour deux sous ils prenaient leur goutte d'eau de vie, ils allaient un peu plus loin et remettaient ça.
Bépin
Avec son chien et son charreton, tous les matins, il allait faire sont tour de ville- Son chalet derrière la Bélièra près des trois croix.
Les gendarmes
Toutes les années au mois de janvier, on tirait au sort, selon les besoins du recrutement. Les premiers numéros étaient envoyés dans les colonies. Les gendarmes descendaient dans la grande rue en grande tenue de service avec bicorne, cocarde et ruban aux trois couleurs, armés d'un petit fusil mousqueton qui n'était pas en rapport avec leur taille, ils formaient la haie devant la mairie (ils étaient tout de suite quatre). Les conscrits avaient leur drapeau parfois avec le buste plantureux de Marianne imprimé dans l'étoffe - Jausiers- La Condamine - Les Thuiles. Après le tirage au sort, apéritif et chaque groupe allait dîner au restaurant, en sortant légèrement pris de boisson, ils s'attrapaient à coup de pierre, je me rappelle qu'une fois on les avait accompagné jusqu'au premier tunnel.
Les italiens
Tous les ans au printemps, les italiens venaient sur la Place s'afitar (se placer chez un patron) jusqu'à la Toussaint, le prix était d'environ 90 francs pour la saison. On leur payait la feuille de droit d'entrée-40 sous, ési lo picho travailla ben, per la fièra de l'outon li donarein ein buan couteau, marca la cigognoa (9 sous) (si le petit travaille bien, nous lui donnerons un bon couteau marqué LA CIGOGNE marque réputée de couteau de berger avec manche en corne massive) .
Le feu à Faucon
Un hiver, au mois de janvier, il faisait un froid de loup. Le cousin Millou vient me réveiller Louï, Louï... ya lo fuae (il y a le feu). Je me mets à la fenêtre et je vois une grande lueur, comme j'étais clairon au pompiers, j'ai réveillé tout Barcelonnette. C'était sérieux, il est même descendu de Jausiers avec une pompe, la section de gymnastique du 15, c'était deux ou trois heures du matin.
La BOUDUFA.
Nous étions quelques gosses jouer de la toupie dessous le portail de la vieille église, on faisait un grand rond et on y mettait une toupie au milieu il fallait la sortir, certains ne pouvaient pas parce que la pointe de leur toupie était pointue et elles s'endormaient au milieu du cercle il fallait que les copains la sortent, mais los vivos changeaient la pointe et y mettaient la tête d'un clou de fer à cheval, il fallait voir si elles ronflaient et faisaient du chemin. Nous étions tous très atareados (patois, non - espagnol?) quand arrive le curé prend la toupie de François Donnadieu (Benoti) et se la met dans la poche, c'était le fils du cliar qui avait oublié de sonner le dernier de la messe. Il va servir la messe, quand le curé s'approche sur le bord de l'autel avec le calice en mains, François Donnadieu avec ses deux burettes, dit au curé: « Mousu lou cura...reindè ma boudufa sensa aco vous dono pa a béouré » (Monsieur le curé, rendez moi ma toupie, sans cela, je ne vous donne pas à boire.).
Charles Pellotier
Capitaine des Sapeurs Pompiers, place Manuel. En hiver, tous les premiers dimanches du mois, ils faisaient une sortie le long de la digue, bien habillés, casque étincelant, armés de vieux fusils Napoléon III. Tout Barcelonnette était sur pied. A la fête de la Sainte Barbe, on menait la compagnie à la grand messe, capitaine en tête. Le lieutenant Boumboum prenait le commandement direct, dans la compagnie se trouvaient le sergent fourrier RIPERT, marchand de souliers rue Mercière, le sergent JAUBERT épicier à la Grande Rue, Jean Mavande au pied de la Ville. ESMENJAUD, avenue de Nice, les sapeurs : Lo Mearlé BAZASET-TOCA-DUSSERA-CHABRANON-Chamba de gransa- Talamoun-Bastianet etc (sobriquet à éclairer: le Merle,…, jambe de ganse..) et bien d'autres.
A la grand messe, ils formaient la haie au centre de la vieille église au moment de l'élévation, Boumboum commandait d'une voix de stentor.
Sapeurs... Genou terre, le vieux curé CAIRE leur donnait la bénédiction, les clairons sonnaient "aux champs". A midi, apéritif général, à midi, le clairon sonnait la soupe, réunion au restaurant de tour présidée par MM. le Sous Préfet et le Maire. Le repas durait jusqu'à 4 heures environ, il y avait quelques petits discours et chacun chantait sa chanson. Un tour de digue pour faire descendre le dîner, nouvel apéritif, puis à 7 heures, les taillerins suivis d'un grand bal.
Firmin Eyssautier
Chef de musique de la ville et des Pompiers, coiffeur grande rue.
Les musiciens:
- Firmin Eyssautier, piston solo,
- Joseph Eyssautier baryton,
- Eyssautier le Manchot (qui avait été amputé de la main gauche dans une bataille en 1870, basse (médaille militaire),
- Aimé Eyssautier, trombone,
- Ernest Eyssautier tambour,
- Couttolenc de dessus la place qui jouait de la flute,
- Arnaud Chat Miou (Ponts et Chaussées), Basse,
- Buffe, cordonnier contrebasse,
- Laurent Alexis, un jour est arrivé avec un hélicon tout neuf, il le passait autour du corps, pavillon en l'air,
- Tomas, ébéniste, ancien musicien au 28ème bataillon de Chasseurs Alpins, clarinette, s'est marié à Barcelonnette et plus tard bedeau.
- Laugier Antoine, 2ème piston,
- Astoin, imprimeur bariton et autres,
je ne me souviens plus le nom de celui qui nous faisait des solos de grosse caisse. Un jour de sortie, la musique était rassemblée au pied de la ville, il y avait un clairon Batistin Matheron brasseur auquel il lui manquait deux dents, il faisait des canards en veux-tu en voilà, pour éviter ses notes discordantes, un loustic lui avait bouché son clairon avec une pomme de terre, le bruit avait couru, aux premières mesures de la marche qu'on allait jouer, aucun des musiciens n'a pu partir au commandement, il a fallu s'y reprendre à deux fois, à la grande hilarité de tout le monde.
Compagnie de Sapeurs-Pompiers et ses cadres
Capitaine Charles Pellotier de dessus la Place, contre Esquina de l'Hôtel des Alpes. Il avait un neveu pas trop dégourdi que l'on appelait Compote, y jouait du baryton à la musique de Barcelonnette. Tous les premiers dimanches de chaque mois, surtout l'hiver, il y avait prise d'armes, on allait faire des exercices le long de la digue pour s'échouer chez la Clusa à Saint-Pons ou chez Zède à Faucon. Des fois, ils ne s'échouaient nulle part. La Compagnie était au grand complet le jour de la Sainte-Barbe, il n'en manquait pas un. Le matin, le tambour Allègre du pied de ville, maréchal-ferrant (vétérinaire n°2) avec Ernest Eyssautier de mon âge se joignaient aux clairond. Martel « Pilatte » cordonnier, Batistin Matheron le brasseur, le roi des fausses notes. il lui manquait deux ou trois dents puis Charles Allegre, le neveu du tambour et enfin L.R., tambours et clairons. Nous faisions du ramage, sur la Place, au coin du Café de la Vallée (Anaïs Pons), à la Placette et sur le Gravier, sans oublier dévan San Peïré (devant Saint Pierre, l'église), tout le monde se rassemblait place Saint Maurice (il y avait encore la vieille église). Musique pompiers et tout le Barcelonnette élégant. Les pompiers arrivaient avec leur casque cuivre bien astiqués, les musiciens leurs instruments, ça brillait au soleil. Je vous toujours le capitaine Pellotier descendre la grande rue, son plumet, son grand sabre, il était imposant (taille 1,80 m). Le lieutenant Jaubert prenait le commandement de la compagnie. Il était boulanger dans la rue Neuve au dessus de la maison du Docteur Lautaret, on l'appelait BoumBoum. Il cuisait tout le pain de Barcelonnette. Quand notre tour arrivait, il envoyait le mitron à 4 heures du matin nous crier dans l'androna: (passage voûté ou très étroit) PASTA. On se levait et on préparait tout pour 8 heures, on arrivait avec des planches et on portait le pain au four. On faisait un espèce de petit gâteau qu'on appelait Rigondelle, on y mettait une fève dedans ou une petite poupée en porcelaine pour qu'on ne puisse pas l'avaler sans rien dire à personne parce que celui ou celle là qui trouvait ça était obligé de payer quelque chose, des fois la rigondèle était marquée, on savait déjà à qui elle allait tomber.
Nous en revenons aux pompiers. Rippert, sergent fourrier avait un magasin de chaussures rue mercière, actuellement habitée par Pellat le bourellier.
Sergent Jean Mavanda, il vendait du vin bon marché pour faire la concurrence à la Reyna.
Sergent Jaubert l'épicier de la grande rue, actuellement maison André.
Sergent Firmin Esmenjaud.
Il habitait avenue de Nice à gauche en allant au pont, l'autre année j'ai encore vu sa plaque sur la porte, je ne sais pas de quoi il vivait. Dans cette maison habitait la famille Sardi. Nous faisions la partie aux boules avec Louis Sardi, Jean Rebattu et autres au pied de la Croix sur socle en pierre taillée qui a du disparaître au temps du ministère Combes.
Donc, arrivait la Sainte Barbe, le premier dimanche après le 4 décembre, grand remue-ménage, on se formait comme d'habitude au pied de la ville, musique en tête et la compagnie formée sur deux rangs nous allions à la messe. Chaque rang prenait sa place au côté qui lui correspondait et qui formait une haie, pendant l'élévation Boumboum commandait dans le haut De la voix « Sapeurs Genoux Terre ». Monsieur le curé Caire leur donnait la bénédiction, les clairons sonnaient Aux Champs. Après la messe, chacun se tirait de son côté, ils se dispersaient dans les cafés prendre l'apéritif. C'était en général du Pernod avec pas mal de degrés d'alcool, on préparait ça avec une petite cuiller spéciale sur laquelle on mettait un morceau de sucre, et on laissait tomber sur le sucre goutte à goutte de l'eau bien fraîche, cela faisait un apéritif que l'on ne coupait pas au couteau. A midi comme au régiment, le clairon sonnait la soupe. Ce n'est pas de la soupe, c'est du rata... On se réunissait comme à Seyne au restaurant de tour, Le Cheval Blanc, La Marine, l'Hôtel de la Couronne en face de la Marine, chez Borel dit « Callete » au Lion d'Or, mais aussi à l'Hôtel du Pigeonnier chez Brun, dans la rue de l'Abattoir en face le cousin Ricaud du Collingiieu on y allait jamais pour manque de service. Au repas, il y avait le Sous-Préfet, Monsieur le Maire... et ça durait jusqu'à 4 heures du soir . Après venaient les chansons, chacun chantait la sienne. Le musicien Buffe (contrebasse) chantait la sienne qui est restée célèbre (LOS ESPINARCS DE FRANCIA- (Les épinards de France ?- chanson à retrouver)). Après une promenade sur le bord de la digue pour faire descendre le repas, un nouvel apéritif pour aller manger les taillerins, ensuite grand bal jusqu'à minuit, heure militaire. Chacun rentrait chez soi avec une journée bien remplie. Le lendemain, tout le monde avait la gueule de bois. Monsieur le Maire Plaisant, grande rue, faisait son discours, assez court d'ailleurs, faisant l'éloge des sapeurs Dussere, Bastianet, Talamoun,Poitrè et autres. Les habitués de la goutte d'eau de vie le matin chez les épiciers. Je ne me rappelle pas bien comment ils étaient armés, du fusil à pierre la mode était passée ou au vieux fusil réformé que l'on chargeait par la bouche du canon et on mettait une capsule dans une petite cheminée, dessous le chien Parté ou parté pa (ça part ou ça part pas en parlant du fusil) ou alors un chassepot de 1870, peut être reformé aussi, petit à petit. le fusil gras remplaçait ces vieilles armes jusqu'au Lebel de 1914. Le Drapeu. Il ne devait pas y en avoir, je ne l'ai jamais vu ou au moins il était déposé à la Mairie bien enveloppé.