Les souvenirs d'enfance de Louis RICAUD (1ère partie avec traduction)
LE VIEUX BARCELONNETTE. LA BELLE EPOQUE
Disparus
"Los séararaïres d'ou pè de la grava." (les scieurs de long du bas de la place du Gravier.)
"Los Esbarbaïrès d'ou pè de la grava." (ceux qui battaient le blé au même endroit.)
Los charrons, los bastiers. (Les fabriquants de roues, de bâts.)
L'école des frères de la Rue Neuve (de la rue Jules Béraud).
Le journal de Barcelonnette, imprimerie Astoin.
"Las bugadièras de la Grava. (Les lavandières de la Grave.)
Bruneta è las Paradisas." (?)
La grande Croix du pied de la Grava (Ministère Combes) socle en pierre taillée.
Le Bédoc. (le bedeau de l'église.)
Michel le chapelier. Il recevait des "cloches", chapeaux et lui les fabriquait selon le goût du client.
L'hôtel de Provence, dans la petite rue, au dessus de l'annexe de l'Hôtel du Nord.
L'Hôtel du Lion d'Or chez Arnaud, rue Mercière.
L'Hôtel de la Couronne, chez Borel, en face du Café de la Marine.
L'Hôtel du Pigeon Blanc, chez Brun, rue du Pont, actuellement rue Cdt Car.
Les chapeaux pour Dames chez les demoiselles Dunand, grande rue.
Ripert
L'allumeur de réverbères passait tous les matins avec son échelle pour nettoyer et garnir les lampes à pétrole qui se trouvaient aux coins des rues pour éclairer la ville. Le soir, il passait un long bâton pour les allumer. C'était le travail du "trompétéaïré" (le trompetteur) comme on l'appelait. Il avait une voix claire, on l'entendait de très loin.
Les lanternes
Les bonnes vieilles sortaient avec leur lanterne à la main pour s'éclairer le soir dans les rues obscures. Disparus, les viyolas, lampe à huile portative ainsi que les quinquets, lampes à pétrole. L'électricité est venue bien plus tard.
(las viyolas : lanternes formées d'un verre comme ceux pour boire et d'un chapeau conique, garnies d'huile avec un flotteur.)
Les chaufferettes_(las banquétas)
que l'on se mettait sous les pieds pour aller à la prière du soir.
Pâques
"Lo tarabasc è las escarouiras" (les crécelles pour annoncer la messe quand les cloches sont à Rome), nous faisions le tour de la ville pour annoncer le premier et le second des Offices, nous passions dans les corridors des maisons avec pas mal de bruit. Les cloches étaient parties pour Rome, avec lo cliar (le clerc) Benoti, il fallait voir les cloches tourner le samedi Saint. Le lundi de Pâques, jour férié chacun prenait une boule de bois plus ou moins ronde, on jouait le long du chemin, on allait soit à Faucon chez Z (à retrouver?) ou chez la Clussa à Saint-Pons (la mère poule, surnom de la dame qui tenait une auberge à Saint-Pons), boire un canon ou manger du bon fromage bleu, ceux qui perdaient payaient l'écot. Il y en avait tout de suite pour 30 sous.
Le charivari
que l'on faisait aux vieux qui se mariaient. Ils entraient chacun de leur coté, soit à la Mairie soit à l'Eglise, quand ils sortaient ensemble, il fallait voir ça, le concert des vieilles casseroles dans la rue. Nous autres les petiots, avions la spécialité d'attacher des casseroles à la queue des chiens. Il fallait les voir monter dans la grande rue, ventre à terre, pour aller se réfugier fatigués de leur longue course.
François MARTEL
cordonnier, rue Manuel (actuellement maison Abel)- Président de la Confrérie des Pénitents, inventeur de la salopette (pantalon de pëchèra). Il partait le dimanche avec sa cloche à mains et faisait le tour de la ville pour annoncer la messe de 7 heures à St. Maurice. Une fois que la procession sortait de Saint Maurice, les pénitents tous vêtus de blanc, arrivaient déjà à la hauteur du Café de la Vallée, le Saint Sacrement était en retard pour suivre, il partit aussitôt en criant à ceux de la tête du cortège: "ARESTA VOUS... ARRESTA VOUS... què lo Boun Diou es einca ou diablé". (Arrêtez-vous que le bon dieu est encore au diable.)
Bourgès
Menuisier au pied de la ville, grand chasseur de chamois, avait une propriété à Baumelonge, il laissait sa grange ouverte, les chamois venaient manger le foin, la porte se refermait automatiquement et le chamois était pris. Tous les samedis, il y en avait un ou deux pendus devant sa porte. Il avait un chien de chasse fameux. "Can mon chin couré dareire eina lèbré es pire qu'éna bestia." (Quand mon chien court derrière un lièvre, il est pire qu'une bête.). D'où l'expression Barcelonnette, il se met comme le chien de Bourges, il se met dans tous ses états.
Talamoun
Charpentier Rue Neuve avait trois enfants et leur dit: "tu Batistin pren tou coumpas è ta règla è vai cubar la luna. (Toi Batistin, prends ton compas et ta règle et va mesurer la lune.)
A l'autre: tu farès ein buan mestré d'escola. (toi, tu feras un bon maître d'école.)
et au dernier: tu farès ein bouan caga brayas." (toi, tu feras un bon cague au pantalon.)
"L'embeartasa ou embeartassa"
Cuisinière chez M. BERLIE, notaire Rue Neuve. Avait fait cuire des grives et les avait vidées (réprimande). Quelques jours après elle fait cuire une poule avec tout et tout (réprimande), elle se tourne vers la maîtresse de maison et lui dit: "Madame, sabou pus qué faïré, ein viaji voulait la mearda, ein viaji la voulê pa." (Madame, je ne sais plus que faire, une fois vous voulez la merde, une fois vous ne la voulez pas.)
Arnaud
Maire de Fours, père du maire actuel. Quand M. DELOMBRE faisait sa propagande pour député, naturellement il est allé à Fours, on lui a fait les raviolis aux pommes de terre, au cours du repas il tape sur l'épaule du candidat et lui dit: "Moun bravé Moussu Delombre, tan qué sari méré dé Fours vous sarés deputa". (Mon cher Monsieur Delombre, tant que je serai maire de Fours, vous vous serz député.) Invité a la Sous-Préfecture pour un dîner, au dessert il sort sa pipe et crache par terre, la bonne lui apporte tout de suite un crachoir, "Madamisele léva mé aco aqui, sensa aco lis escupo dedin". (Mademoiselle, enlevez moi ça de là, sans quoi, j'y crache dedans.)
Emile Chabrand
Américain des temps passés. Précurseur de l'aviation. Devant son chalet, à côté du musée, il avait construit un aéroplane en toile et bambou, il lui manquait le meilleur un bon moteur, il n'a jamais pu décoller. Nous autres la marmaille allions voir, on nous faisait partir et comment. Il était l'auteur d'un livre "Les Barcelonnettes au Mexique" qui avait eu assez de demande dans le pays.
La Belle Epoque.
En ces temps là, le Marquis de la Fournière avait demandé en duel le Conte Martin de Pra Soubeïran, sale histoire, pour une question de poules "qué anavoun raspatear lo bla" (poules qui allaient gratter dans le blé). Echange deux coups de revolver sans résultat. Ils se sont réconciliés au Café de Paris (voir Journal de Barcelonnette du temps). Arbitre le célèbre ESCARTEFIGUE.
Jeors?
avait une propriété au plan, tous les jours il y allait travailler. Etant tombé malade on fait appeler M. le Curé pour lui donner les Saints Sacrements, le curé partait dans la rue avec son étole, accompagné du cliar qui portait la croix et une sonnette. Lorsqu'il passait, les gens se signaient. On allait lui donner l'extrême onction, alors il se tourne et dit : "Moussu lo Cura, mé gatilé pas los pès qu'ay pa envea de rire" (Monsieur le curé, ne me chatouillez pas les pieds que je n'ai pas envie de rire).
Chiardola
avait un âne qui gagnait le 1er prix de course (30 frcs) le 14 juillet. La course se passait sur le grand pré de M. Gassier au Plan.
Boules
On ne joue plus aux boules aux allées, "an léva presqué totas las piboulas" ils ont enlevé presque tous les peupliers).
Le vieux Barcelonnette. 1890-1910.
J'étais petit, j'allais à l'école du père Giraud. Avec un sou, j'achetais une barre de chocolat, avec deux sous on en achetait une plus grosse, un sou de bonbons anglais à la menthe chez Bergouin à la Placette, deux sous de débris chez les pâtissiers A. Sauve ou Henric, on s'en mettait plein la lampe.
Ce qu'il faut voir - Les sites pittoresques pour touristes en excursion dans la Vallée de l'Ubaye.
La Couagna - site renommé pour son eau fraîche (captage pour l'eau de Barcelonnette), belle vue sur les cols de la Pare et des Orres.
Peïra Sinouïra - se trouve dans l'embranchement de la route de Fours avec le vieux chemin de la Malune, le jour de la fête, le 4 juillet (Notre Dame des Lumières) Los Uvernojés y allaient en procession... casser la croûte...
Lo Pas dé las chivillas. Se trouve sur le sentier qui va du Paluel a Morjuan, le chemin monte un peu.
Las Maït's. Grandes plantations de pins par le Reboisement. On mettait "eina meynaya" (un enfant) avec un tire pierre pour faire peur aux oiseaux pour qu'ils ne mangent pas la graine semée pour les plantations. Solde 40 sous par jour.
Saint Ours et ses fameux rochers. le jour de la fête, les jeunes et vieilles filles allaient prier afin de trouver un mari pour se marier. Procession, elles chantaient Glorieux Saint Ours, priez pour nous.
La Fournière. Belle vue sur le Riou Bourdoux, belle route pour tombereaux et charrettes, toutes commodités. Electricité, salle de bains à l'Ubaye, monte pente pour le fouin. Lieu de naissance du marquis de la Fournière, député et maire de la ville.
Cafés et Restaurants recommandés.
La Clusa dé San Pouans. (la mère poule de Saint-Pons) Gros rouge et fromage bleu, belle vue sur Uvernet, vallée du Bachelard.
Zèda dë Foucoun. Bistrot et banquier BB. Spécialité en Pernod's frais.
Les Thuiles. Tous les vendredis, taillerins au gruyère. Abonnés largement connus à Barcelonnette.
Jausiers. Hôtel Meyran, champagne spécial pour Messieurs les Américains.
Le Café de Paris. Très recommandé, très connu au Mexique, fréquenté par la haute société de Barcelonnette. Musique des chasseurs sur la place.
Le Violon Municipal- Hôtel spécial pour poivrots. Prix réduite. Directeur gérant Desmaisons.
N.D.L.R. Tous ces sites, Restaurants et Cafés figurent sur le guide Michelin et Touring Club de France.
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